Assemblée générale de l’Association de Soutien aux Travailleurs Immigrés – ASTI asbl
11 juin 2018
Résolution politique
Depuis un certain temps, les politiques du Luxembourg se sont enferrés dans un débat difficilement envisageable dans un autre pays que celui qui est le nôtre : un des plus riches au monde avec une croissance annuelle de 4%!
S’il est légitime, et même hautement recommandable, de réfléchir et de débattre de l’avenir du Luxembourg, l’approche choisie par certains qui consiste à mettre en avant le fantomatique million d’habitants et le supposé déferlement des frontaliers sur notre marché du travail n’est en réalité qu’une stigmatisation de « l’autre ».
L’épuisement des ressources naturelles, les problèmes de circulation, les prix exorbitants des logements, nos mauvais résultats récurrents dans l’étude internationale PISA, voire bien des maux du pays, seraient la conséquence de l’augmentation de la population ! Qui dit croissance démographique dit immigration et mobilité de la main d’œuvre, et c’est « l’autre » qui est pointé du doigt !
Si le Luxembourg a vécu (ou subi, selon certains) lors des dernières décennies une croissance exponentielle de sa population, c’est parce que son développement économique l’a dicté. Donc, la croissance démographique et les phénomènes de mobilité accrue sont, non pas une cause mais une conséquence de celui-ci.
Pour L’ASTI, le débat sur l’avenir du pays doit considérer particulièrement la cohésion et de la paix sociales. Or, ce n’est pas en semant la méfiance et la haine de « l’autre », comme cela arrive trop souvent, surtout sur les réseaux sociaux, que nous arriverons à affronter les défis du XXIème Siècle.
Il est donc indispensable, que la classe politique – majorité comme opposition – s’attellent aux questions du vivre ensemble. Nos dirigeants doivent considérer que les femmes, les hommes, les familles qui vivent et travaillent dans notre pays constituent une réalité multiple. Il est tout aussi indispensable qu’ils aient le courage d’annoncer à leurs électeurs que TOUS doivent faire partie d’un projet d’avenir commun.
Sur base de ces constats, l’Assemblée Générale de l’ASTI, réunie le 11 juin 2018 :
- interpelle la société luxembourgeoise dans son ensemble à considérer l’immigration comme élément constitutif de notre pays ;
- appelle les femmes et les hommes politiques à tenir compte de cette dimension de notre société dans la campagne électorale pour les élections législatives, en évitant d’instrumentaliser et de détourner les questions du vivre ensemble ;
- met en garde ceux des responsables politiques, des médias et d’autres acteurs publics qui n’hésitent pas à verser dans les discours identitaires, anti-étrangers et anti-frontaliers : les clivages et la banalisation de la haine avec lesquels certains jouent détruisent notre cohésion sociale;
- regrette que la proposition de révision portant instauration d’une nouvelle Constitution, dont le rapport vient d’être adopté, ne prenne pas en considération la diversité de la société luxembourgeoise, car elle maintient la séparation entre Luxembourgeois et étrangers ;
- exige que le Gouvernement qui sortira des prochaines élections consacre des moyens financiers conséquents aux politiques d’intégration, aussi bien des demandeurs et bénéficiaires de protection internationale, que des migrants qui continuent à venir nombreux au Luxembourg;
- réclame le développement d’un programme et d’une culture d’accueil au niveau national et communal (Willkommenskultur), s’inspirant des bonnes pratiques déjà existantes et soutenu activement par le gouvernement et les communes ;
- propose la création d’un observatoire des phénomènes racistes et xénophobes, organisme de veille et de communication, doté de moyens matériels et humains correspondant à l’importance de l’enjeu ;
- revendique une diminution, voire une abolition de la condition de résidence de 5 ans pour qu’un étranger puisse s’inscrire sur les listes électorales communales ;
- reste convaincue que la voie à suivre à moyen et à long terme pour mettre fin au déficit démocratique auquel nous sommes confrontés, est la consécration du principe du droit de vote selon la résidence et non pas selon la nationalité ;
- manifeste sa disponibilité pour contribuer au dialogue et à la discussion ouverte avec tous les acteurs politiques, associatifs, sociaux, économiques, culturels et autres, dans la recherche du renforcement de la cohésion sociale ;
- renouvelle son engagement pour une société nouvelle, solidaire, riche de sa diversité et pour un meilleur vivre ensemble !
adoptée à l’assemblée générale du 11 juin 2018