épicerie sociale luxembourg

Pour les travailleurs vivant dans notre pays en situation administrative irrégulière, l’arrêt des activités économiques suite à la pandémie du COVID-19 fut dramatique. Originaires de pays non membres de l’Union européenne, ceux-ci travaillaient avant la crise dans des conditions non conformes à nos lois. Non déclarés à la Sécurité Social, ils recevaient un salaire bien en dessous du salaire minimum légal, pour certains depuis de nombreuses années. Suite à l’arrêt des activités économiques, ces personnes se sont retrouvées sans emploi, sans aides de l’État, ni droit à l’aide sociale.

L’ASTI a assumé ses responsabilités. Elle a, avec l’aide de son Guichet Info Migrants et de ses bénévoles, mis en place depuis le 10 avril une permanence de distribution de bons alimentaires permettant aux personnes et à leurs familles vivant dans notre pays en situation administrative irrégulière, d’accéder aux épiceries sociales. Une occasion de leur venir en aide mais aussi de les sensibiliser aux gestes barrière et à aller se tester. Nous avons ainsi distribué des centaines de masques car, ces personnes n’étant pas des résidents légaux, n’ont pas eu droit aux masques distribués gratuitement par les autorités.

Grâce au soutien de nombreux donateurs, l’ASTI a pu récolter une dizaine de milliers d’euros et un secours exceptionnel de l’Œuvre Nationale de Secours Grand-Duchesse Charlotte, ce qui nous a permis de distribuer aux sans-papiers des bons alimentaires pour une somme totale de 36.098 €. Nous avons arrêté notre aide le 17 juillet car nous avons complètement épuisé cette réserve de dons. Si la crise perdure nous devrons faire un nouvel appel à la générosité de nos donateurs .

La ministre de la santé a appelé les personnes sans papiers ou sans sécurité sociale à aller se tester. Beaucoup d’entre eux vivent dans des communautés de vie à plusieurs dans des espaces exiguës et ont peur d’aller se dépister. La ministre n’a toutefois pas indiqué que faire en cas de contamination de ces personnes et où elles pourraient aller en quarantaine !

Selon l’ASTI, renvoyer les personnes sans papiers ou sans sécurité sociale qu’à la hotline téléphonique du COVID 19 et aux informations dans différentes langues sur le site officiel, n’est pas une mesure appropriée. Dans les lieux de dépistage la première question qu’on vous pose est celle de montrer vos papiers d’identification!

Les sans papiers qui ont la chance de retravailler depuis la fin du confinement le font dans des métiers précaires sans sécurité d’emploi, ni sécurité sociale. Pour eux le dépistage constitue un danger de perdre leur travail, s’ils sont dépistés positifs . Il s’agit entre autres des femmes de ménage travaillant chez les particuliers sans être déclarées, des emplois intérimaires dans la construction, voire non déclarés dans le secteur HORECA.

Aussi l’ASTI plaide-t-elle d’organiser pour ces populations sans papiers ni sécurité sociale voire sans abris – un accès à des structures pour se faire tester dans lesquelles elles ont confiance. Ces structures pourront ainsi faire le suivi et le cas échéant organiser la quarantaine des personnes atteintes du COVID19. Dans ce cadre, on pourrait, par exemple, collaborer avec les nombreux hôtels qui traversent des difficultés suite au manque de clients.

A noter que pendant des années les gouvernements successifs ont systématiquement refusé de subventionner des services œuvrant pour sortir de l’illégalité les sans-papiers, à l’exemple du guichet Info Migrants de l’ASTI, qui a mis 20 ans à obtenir en 2018 le financement d’une seule assistante sociale qui s’occupe de ces questions.

L’ASTI est d’avis qu’un appel à ces populations de sans-papiers pour qu’elles aillent se tester ne sera efficace que si une perspective de régularisation leur est proposée. N’oublions pas que leur seul tort est de n’avoir pas pu accéder à une autorisation de séjour leur permettant de travailler légalement au Luxembourg. Nombreux sont ceux qui disposent d’un logement, vivent ici avec leur famille, certains avec des enfants scolarisés. Au Portugal la loi sur l’immigration prévoit un tel mécanisme de régularisation, au Luxembourg non.

C’est une question de dignité humaine à laquelle s’ajoute maintenant avec la pandémie une dimension de santé publique.

ASTI asbl – Luxembourg, le 22 juillet 2020

Bilan quantitatif 

Se sont adressés à l’ASTI pendant notre distribution des bons alimentaires

253 personnes, parmi eux 69 enfants. Ils représentent 134 ménages dont :

  • 36 familles ayant jusqu’à 5 enfants ;
  • 8 familles mono parentales avec 1 à 2 enfants ;
  • 10 couples sans enfants ;
  • 80 célibataires.

Les principales origines des personnes qui font appel à notre aide sont :

  • essentiellement des Brésiliens et des Péruviens d’Amérique Latine,
  • des Sénégalais, Camerounais, Nigérians, et Capverdiens de l’Afrique subsaharienne
  • des personnes venant de pays du Maghreb,
  • d’ex-Yougoslavie (surtout de la Serbie!!)

Plus qu’un quart des demandeurs sont originaires des pays de l’ex-Yougoslavie, avant tout des familles, dont la moitié avaient dans le passé introduit une demande de protection internationale.

Leur durée moyenne de séjour au Luxembourg est de 4 à 6 années. Notons que 6 ménages sont au Luxembourg depuis plus de 10 ans, dont 3 plus de 15 ans!

Translate...