
Pour une offensive en faveur de l’employabilité des réfugiés
En l’absence de statistiques fiables et d’études approfondies sur l’employabilité des réfugiés au Luxembourg, les associations en contact avec cette population constatent que les emplois de réfugiés sont très clairsemés. Il existe un réel danger qu’ils s’enlisent dans l’assistanat, ce qui ne manque pas de provoquer des rejets et des frustrations aussi bien chez les réfugiés qu’auprès de la population.
Le LFR regrette que le Gouvernement et son administration n’aient pas de politique cohérente, affichée et proactive en faveur de l’insertion professionnelle des réfugiés. Par contre, d’autres pays, à travers une politique plus réfléchie et plus systématique, ont réussi à augmenter significativement le taux des réfugiés ayant trouvé un emploi – en Allemagne, 70% des Syriens arrivés entre 2015 et 2019 ont un emploi !
Le Lëtzebuerger Flüchtlingsrot (LFR) a décidé de résumer dans un tableau de nombreuses mesures en faveur de l’emploi des réfugiés. Celles-ci sont présentées par étape afin de souligner l’importance d’activer les réfugiés dès leur arrivée au pays. Un texte explicatif argumente nos propositions d’étapes concrètes et indispensables pour l’intégration des réfugiés par l’accès au marché de l’emploi.
Ce travail de propositions est le fruit de l’analyse de 31 études internationales et nationales et de l’évaluation de 25 projets d’intégration au marché de l’emploi gérés par 15 initiatives surtout associatives du Luxembourg.
Le Lëtzebuerger Flüchtlingsrot formule 5 priorités pouvant être mises en pratique immédiatement :
L’abolition de tout délai pour accéder à l’Autorisation d’Occupation Temporaire -AOT[1] et l’activation au travail des demandeurs de protection internationale (DPI) doit se faire dès leur arrivée au pays à travers un programme sensibilisant les entreprises à l’opportunité d’emploi que représente ce public cible, grâce entre autre, à l’AOT. Un screening du parcours scolaire, professionnel et des compétences des DPI et BPT devrait être fait immédiatement.
Un accès à toutes les offres de l’ADEM pour tous les DPI – et non seulement pour les Bénéficiaires de Protection Temporaire (Ukrainiens)- doit être immédiatement mis en place. Cet accès direct constitue une opportunité pour combler certains métiers en pénurie ainsi que d’autres professions où les compétences du public cible pourront être des atouts pour le Luxembourg.
Une politique volontariste d’accès à l’apprentissage des réfugiés doit :
- abolir les conditions d’accès à la formation d’adultes ; [2]
- offrir des formations de préparation à l’apprentissage dans différents secteurs comme c’est déjà le cas pour les métiers de HORECA, à l’École d’Hôtellerie et de Tourisme du Luxembourg ;
- garantir que le réfugié puisse terminer son apprentissage en cas de refus de la demande d’asile et, si un contrat de travail lui est proposé, accéder automatiquement à l’autorisation de séjour en tant que travailleur salarié.
Sensibiliser et outiller les entreprises à l’emploi des réfugiés grâce à une offre de formations gratuites dispensées par des experts en la matière (associations du terrain …) visant les RH et le personnel.
Transformer la plateforme interministérielle qui a été créée sous l’égide du Ministère de la Famille, des Solidarités, du Vivre ensemble et de l’Accueil (MFSVA) pour favoriser davantage l’employabilité des Demandeurs de Protection Internationale (DPI), des Bénéficiaires de Protection Internationale (BPI) et des Bénéficiaires de Protection Temporaire (BPT) et qui rassemble divers acteurs ministériels et administratifs[3] en TASK FORCE. Elle doit être renforcée par l’expertise d’associations actives dans le domaine, sur le terrain.
Ces mesures s’imposent, car en l’absence d’un emploi, les Bénéficiaires de Protection Internationale peinent à trouver un logement et donc à sortir des structures d’hébergement de l’ONA.
Plus tôt ils deviennent actifs professionnellement, plus vite leurs perspectives de sortir de l’assistanat s’améliorent. Appliquer nos recommandations constitue, à moyen terme, un gain pour l’État, au vu des nombreux réfugiés reconnus qui n’ont pas d’autres solutions que de rester bénéficiaires du REVIS.
Les caisses de l’État vont à l‘avenir être davantage sollicitées (p.ex. pour la politique de réarmement de l’UE) et la richesse nationale risque de diminuer, vu le contexte économique international très incertain. Il faut éviter les situations qui s’enlisent et des sentiments de rejet de part et d’autre qui risquent d’apparaitre, si nous poursuivons sans politique d’emploi ciblant les réfugiés dès leur arrivée.
L’approche nationale a longtemps écarté les DPI en cours de procédure, des mesures d’activation professionnelle, au motif qu’une partie d’entre eux avait vocation à être déboutée du droit d’asile. Le LFR est convaincu qu’il est dorénavant nécessaire de revoir cette stratégie qui entraîne l’inactivité forcée, éloigne du marché de l’emploi les personnes déjà au Luxembourg et contribue à l’engorgement des structures d’hébergement.
Au reproche qu’une telle politique risque de susciter la venue de plus de réfugiés au Luxembourg, le LFR répond qu’elle sera bénéfique pour l’emploi en général au Luxembourg, si celle-ci est orientée vers des métiers à besoin de main d’œuvre et complétée par des changements législatifs de la loi sur l’immigration.
Combattre toute forme d’oisiveté, non voulue par les personnes concernées est primordial. Elle freine sur le processus d’intégration professionnelle mais aussi sociale des réfugiés. En fin de compte, c’est le Vivre-ensemble au Luxembourg qui en sort impacté.
Le Lëtzebuerger Flüchtlingsrot LFR – Collectif réfugiés – mai 2025
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[1] Le LFR est d’avis que l’AOT devrait être abolie.
[2] Ne plus être sous régime scolaire initial ou sous contrat d’apprentissage initial depuis au moins 12 mois ; se prévaloir d’une affiliation au Centre commun de la Sécurité sociale d’au moins 12 mois continus ou non et d’au moins 16 heures par semaine auprès d’un ou plusieurs employeurs.
[3] l’Office national de l’accueil (ONA), l’Office National de l’Inclusion sociale (ONIS), la Division « Vivre – ensemble » du MFVSA, l’Agence pour le Développement de l’Emploi (ADEM) du Ministère du Travail, la Direction Générale de l’Immigration du Ministère des Affaires intérieures (MAINT), ainsi que l’ADEM , le Service de formation des adultes (SFA) et le Service de la formation professionnelle (SFP) du Ministère de l’Éducation nationale, de l’Enfance et de la Jeunesse (MENEJ)